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Les Rêveurs

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Chroniques BD

Chronique | Dallas Cowboy

scénario et dessins : Manu Larcenet
Éditions : Les Rêveurs (1997)
Collection : On Verra bien
Public : Adulte
Pour les bibliothécaires : Important pour une bédéthèque de grande taille, plus anecdotique pour les moyennes, à oublier pour les petites.

« la nuit, il se passe des trucs étranges »

Au départ, j’avais envie de faire une chronique du second volume de Blast. Puis, j’ai lu les nombreuses critiques qui ont déjà été faites un peu partout. La plupart sont, à juste titre, dithyrambiques et beaucoup de belles analyses ont rendu hommage à une série qui, c’est mon humble avis, confirme mon impression initiale. Blast marquera pour très longtemps l’œuvre de Manu Larcenet.

Ainsi, plutôt que de répéter des choses qui ont déjà été évoqués en mieux, je préfère consacrer ma chronique (et mon temps qui vaut ce qu’il vaut mais quand même) à un album qui date de 1997. Le siècle dernier donc. C’était bien avant la reconnaissance du grand public avec Le Combat Ordinaire ou le Retour à la terre. Il date d’une époque où Blast n’aurait pu sortir chez un éditeur comme Dargaud et où Larcenet était en froid avec les indépendants. La solution était toute trouvée, publier soi-même ses livres.

Dallas Cowboy fait donc partie des premiers titres parus chez Les Rêveurs (de runes à l’époque). Dallas Cowboy, L’artiste de la famille, On fera avec, Presque… Dans ces premiers livres, Manu Larcenet adopte un ton très différent, en tout cas très différent des albums d’humour qu’il créé à l’époque. Introspectifs, ils sont à chaque fois des réflexions sur son passé, sa condition d’artiste, sur ce qui l’a marqué en tant qu’homme. On découvre avec étonnement un autre Larcenet, au trait sombre et charbonneux. Mais c’est surtout l’écriture de l’auteur qui frappe, cette plume qui lui permet de mettre les mots sur ses maux et de toucher avec justesse le cœur des événements et des lecteurs. Bien entendu, nous ne sommes pas encore au niveau de Blast.

Dans Dallas Cowboy, Manu Larcenet cherche le sommeil à l’heure où Juvisy se réveille. A la lueur des premiers rayons de soleil, il laisse aller son esprit, sa mémoire et ses angoisses. Et déjà les mots frappent : « Quand j’étais petit j’étais heureux ? Mmh… non… J’étais gros… déjà ! ». Oui, de là à franchir le rubicon de la comparaison avec Blast… Non sans moi. Alors , où le petit Manu arborant fièrement le T-Shirt des Cowboys de Dallas nous emmènera-t-il ? Loin, très loin dans l’esprit du personnage/auteur, entre le présent moite d’une chambre où le sommeil tarde à pointer et le passé ingrat fait d’humiliations et de souvenirs sombres. Ce court récit oscille sans cesse entre ces états et sont marqués par un changement de style graphique. D’un dessin gros pif proche de celui de Bill Baroud on passe à des masses noires formant des personnages aux traits cadavériques et des paysages inquiétants. Ici, seul le présent apparaît comme réel, le reste, le passé, n’est constitué que de figures floues et malsaines. Pour le lecteur, ce n’est pas facile d’être dans la tête de ce Manu Larcenet là. Il est sans concession et cherche à expliquer… Quoi ? La question est bonne. Elle est sans aucun doute le moteur principal de l’intérêt du récit. On ne pourra pas répondre, les albums de BD ne remplace pas une psychanalyse.

Soyons clairs. Ne cherchez pas dans cette chronique une tentative pour lier Dallas Cowboy à l’œuvre actuelle de Manu Larcenet. Cet album et les autres ne sont pas des prémisses à Blast, pas plus que ceux d’un Combat Ordinaire. Ils ne vous révéleront pas les clefs de l’esprit de Polza Mancini, pas plus que celui de l’auteur de ces magnifiques albums. Ils sont pourtant à mon avis, non pas essentiels, mais important pour comprendre et prendre la pleine mesure des évolutions d’un auteur devenu un incontournable. Pour détourner un peu la célèbre phrase de Mère Thérèsa : « ce ne sont que quelques page dans un livre mais si elles n’étaient pas là, elles manqueraient… »

A consulter : la fiche album sur le site des Rêveurs

A lire : la chronique (de 2006) de Mike consacré à Presque… D’ailleurs il rend hommage à un certain bibliothécaire

A voir : la vidéo d’Un Monde de Bulles consacrés à Blast et à Larcenet (entres autres)

Chroniques BD

Presque

(histoire et dessin de Manu Larcenet, aux éditions Les rêveurs de runes)

Je ne connaissais pas l’album Presque de Manu Larcenet. Je l’ai pris en faisant confiance à l’un des bibliothécaires de Poissy et je ne le regrette vraiment pas…

Je regrette seulement d’avoir chroniqué La ligne de front sans avoir lu Presque avant. J’aurai mieux compris les engoulevents, les gradés stupides et les angoisses du caporal Van Gogh…

Je regrette aussi d’avoir chroniqué Le combat ordinaire sans connaître le Marco de Presque et la mère de Manu lui annoncer (déjà) « Je t’ai fait du poulet…« .

Je regrette enfin d’avoir fait mon service militaire sans trop me poser de questions et, surtout, sans colère, puisque c’est de cela dont nous parle Manu Larcenet dans Presque.

Enfin, il nous parle surtout d’enbrigadement, de violence, de perte d’identité et d’humanité, de repères et d’une journée très particulière vécue pendant les manoeuvres de fin de classes sur une base désaffectée de l’Armée de l’Air, en Lorraine, avec son compagnon Marco.

Presque n’est pas un cri anti-militariste râgeur. C’est un coup de poing visuel en même temps qu’un témoignage intime et bouleversant, calmement sussurré à votre oreille (c’est d’autant plus terrifiant). On y retrouve déjà (l’album date de 1998) tout ce qui a fait le Manu Larcenet que nous connaissons aujourd’hui…

Merci au personnel de la Bibliothèque Municipale de Poissy sans qui la rencontre avec cet album essentiel ne serait pas arrivée…

A lire (indispensable) : l’interview de Manu Larcenet sur du9.org (1998)

A lire : les chroniques de Presque sur du9.org et coinbd.com

A lire (aussi) : la bio de Manu Larcenet sur Wikipedia.org

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