La malédiction d’Edgar (scénario de Marc Dugain, dessin de Didier Chardez, éditions Casterman, 2007)
« Edgar aimait le pouvoir mais il en détestait les aléas. Il aurait trouvé humiliant de devoir le remettre en jeu à intervalles réguliers devant des électeurs qui n’avaient pas le millième de sa capacité à raisonner. Et il n’admettait pas non plus que les hommes élus par ce troupeau sans éducation ni classe puissent menacer sa position qui devait être stable dans l’intérêt même du pays. Il était devenu à sa façon consul à vie. Il avait su créer le lien direct avec le Président qui le rendait incontournable. Aucun ministre de la Justice ne pourrait désormais se comporter à son endroit en supérieur hiérarchique direct. Il devenait l’unique mesure de la pertinence morale et politique. John Edgar Hoover, à la tête du FBI pendant près d’un demi-siècle, a imposé son ombre à tous les dirigeants américains. De 1924 à 1972, les plus grands personnages de l’histoire des Etats-Unis seront traqués jusque dans leur intimité par celui qui s’est érigé en garant de la morale… »
C’est ainsi que l’éditeur présente non pas la BD, mais le roman La malédiction d’Edgar, du même Marc Dugain (également auteur de La chambre des officiers, son premier roman paru en 1998, de Campagne anglaise et de Heureux comme Dieu en France). Car la première originalité de cet album est d’être une mise en image cinématographique (dixit le scénariste) du roman éponyme. On y retrouve, par séquences historiques, quelques grands moments de la vie d’Edgar J. Hoover, le mythique patron du FBI. Ces épisodes ont tous un lien avec un autre mythe américain : le clan Kennedy et plus particulièrement Joe Kenedy, le père de John et Ted. Et si l’on a pu parfois lire que les « aléas » de la famille Kennedy ressemblaient à une malédiction qui lui aurait été jetée, nul doute que le puissant Hoover y a apporté sa (peu modeste) contribution…
La malédiction d’Edgar est un album passionnant, superbement et efficacement mis en image par Didier Charvez, qui donnera envie à ceux qui ne l’on pas encore fait d’en savoir plus sur l’histoire secrète des Etats-Unis au XXème siècle. Les plus courageux se lanceront ensuite dans la lecture du sublime American tabloïd de James Ellroy…
A lire : l’album complet sur le site des éditions Casterman ! Il suffit de s’abonner au club Casterman (ce qui doit prendre environ 30 secondes…)
A lire (aussi) : après celui des éditions Gallimard, le pitch de Casterman (plus centré sur la famille Kennedy que sur J. Edgar Hoover) : « Années 40 aux États-Unis, Joe Kennedy aspire depuis longtemps déjà à un avenir politique au plus haut niveau, mais sa fortune ne s’est pas faite sans quelques écarts de conduite… Projetant de mettre son aîné dans la course à la Maison Blanche, celui-ci meurt trop tôt emporté par la guerre. C’est donc son frère cadet “JFK” qui sera projeté malgré lui au devant de la scène, subissant l’ambition démesurée de son père. En suivant John Edgar Hoover, on découvrira les dessous de la montée en puissance d’un futur président, mêlant habilement relations avec la mafia et le tout Washington… »